jeudi 4 janvier 2018

Gibelotte en compagnie de Montaigne (suite 8)

aire de repos

C'est  ici un livre de bonne foi, lecteur. Il t'avertit dès l'entrée, que je ne m'y suis proposé aucune fin, que domestique et privée : je n'y ai eu nulle considération de ton service, ni de ma gloire : mes forces ne sont pas capables d'un tel dessein.  (…) Ainsi, lecteur, je suis moi-même la matière de mon livre : ce n'est pas raison que tu emploies ton loisir en un sujet si frivole et si vain. 
(Essais, Montaigne, ce 12  juin 1580)


C'est la faute à Montaigne


In memoriam 

La Courageuse (Lise Latraverse) est morte en novembre 2003 à Sorel des suites d’un cancer. Le Syndicaliste (Daniel Lussier) est décédé le 7 septembre 2005 à Saint-Hyacinthe (St-Thomas d’Aquin) des suites d’une crise cardiaque.

Nos deux amis avaient moins de cinquante-sept ans. Nous dédions ces pages à leur mémoire.
***
Mise en marche du moteur avec un démarreur neuf
C’est elle qui gouverne, et d’un ton absolu
Elle dicte pour loi ce qu’elle a résolu.
Elle est par vos lâchetés souveraine sur tous
Son pouvoir n’est fondé que sur votre faiblesse.
(Molière, Les Femmes savantes, 1672)
Comme notre esprit se fortifie par la communication des esprits vigoureux et réglés, il ne se peut dire combien il perd et s’abâtardit par le continuel commerce et fréquentation que nous avons avec les esprits bas et maladifs.  ( Montaigne, Essais, III, 8)
O combien est heureux qui n’est contraint de feindre
Ce que la vérité le contraint de penser,
Et à qui le respect d’un qu’on n’ose offenser
Ne peut la liberté de sa plume contraindre.  (Joachim Du Bellay, 1558)
Je crois finalement qu’écrire fait partie de la liberté d’expression. On a le droit d’écrire comme on a le droit de parler. J’ai toujours aimé écrire, considérant cela comme un droit et non comme un métier.
(Jacques Ferron, octobre 1972)

***
A bord ! A bord ! Le navire a chargé le vent sur son épaule de toile. Avant tout, sois véridique avec toi-même, d’où découlera, comme du jour la nuit, que tu ne seras faux pour personne. (Hamlet)
Affirmons en commençant un fait capital et navrant. Nos adversaires avaient de l'argent certes mais ils manquaient de  classe. Oui, ils n'avaient pas de classe. C'est ce qui caractérise les parvenus qui se complaisent dans leur statut et qui sont pleinement satisfaits du statu quo. Ils n'ont pas d'éthique puisque dans leurs actions malveillantes, la fin justifie les moyens. Nous les avons combattues, employons le féminin pluriel, puisque la  responsable de tout ce gâchis était une femme. Nous avons évité que de faux témoignages conduisent à une parodie de la justice et à une erreur judiciaire.
La directrice a présenté sa version de l'affaire. A partir des mêmes faits, voici celle du Littéraire: c'est Pour ainsi dire la version syndicale. Les mêmes faits sont racontés mais à un autre point de vue. Ce n'est donc pas de la répétition. Lisons Montaigne pour comprendre ce qui est exigé du lecteur (ou de la lectrice…)  
« Cette longue attention que j’emploie à me considérer, me dresse à juger aussi passablement des autres : Et est peu de choses, de quoi je parle plus heureusement et excusablement. Il m’advient souvent, de voir et distinguer plus exactement les conditions de mes amis qu’ils ne font eux-mêmes » (Essais III, 13).

« La parole est moitié à celui qui parle, moitié à celui qui l’écoute » (Essais,III, 13).

« Cettui-ci se doit préparer à la recevoir [la parole], selon le branle [mouvement] qu’elle prend. Comme entre ceux qui jouent à la paume, celui qui soutient, se démarche et s’apprête, selon qu’il voit remuer celui qui lui jette le coup, et selon la forme du coup ».

Montaigne compare la conversation au jeu de paume, donc à une joute, un affrontement où l’un gagne et l’autre perd, où ce sont des adversaires, des rivaux. Ne nous méprenons donc pas. Il ne s’agit pas pour l’un de se mettre à la portée de l’autre, mais pour l’autre de compter avec l’un. Dans le chapitre De l’art de conférer, Montaigne concède la peine qu’il a de donner raison à un interlocuteur. Mais pour que l’échange soit beau, comme au jeu de paume, chacun doit y mettre du sien.
Dans les Confidences, la directrice a envoyé la balle au mur. Comme au jeu de paume, au Littéraire de renvoyer la balle.
Voici donc sa version de toute l'affaire
Tout a commencé, au printemps de 1997, peu après la nomination de la directrice, dans le stationnement en face d’un restaurant à dix minutes de marche du collège. En présence du Directeur des ressources humaines qui avait annoncé sa retraite, comme le Syndicaliste, ex-président du syndicat des enseignants de notre collège et vice-président de la Fédération autonome du collégial sortait du restaurant après un repas avec ses amis du syndicat, la directrice qui se dirigeait à pied vers le collège a fait volte-face et, à notre grande surprise, a marché plus de soixante pieds, (la distance du marbre au premier but à la balle-molle) pour venir lui donner l’accolade en lui suggérant de poser sa candidature au poste vacant. Il faut savoir qu’il hésitait à se présenter mais devant tant de chaleur, il décida de poser sa candidature. La suite des choses allait nous faire comprendre que c’était de la comédie car le Directeur des ressources humaines qui quittait ses fonctions souhaitait que le Syndicaliste lui succède. Le masque est tombé quand nous avons su que cet ex-Directeur avait été écarté du comité de sélection sous prétexte qu’il n’était pas objectif ayant un préjugé en faveur d’un des candidats. Comme on pouvait s'y attendre, la candidature du Syndicaliste a été rejetée. La directrice générale a attendu au lendemain avant de lui téléphoner (notons cette petite cruauté) pour lui annoncer la mauvaise nouvelle en lui disant méchamment : Je vous ai traîné pendant tout le processus. Après avoir analysé ce comportement, du début jusqu’à la fin du processus, en particulier la description tripartite de la fonction qui allait comme un gant à la candidate de Thetford Mines qui a été choisie et le comité de sélection flottant ou bidon, nous avons vu qui était cette femme et, comme dirait Jacques Lemaire, l’ancien joueur et ancien coach du Canadien, nous n’avons pas aimé ce que nous avons vu : une sorte de Machiavel au féminin.
Notre collègue et ami fut éliminé et humilié (pourquoi fallait-il l’humilier ?). C'est le premier geste de provocation de la nouvelle directrice de Sainte-Anne-de-Sorel. Une des premières initiatives de la directrice, en août 1997, au début de la session d’automne, a été de convoquer le président du syndicat, l’Ebéniste, à l’occasion d’une plainte d’une étudiante adulte. Dans son salon à Sainte-Anne-de-Sorel, ses amis libéraux avaient parlé contre lui pendant des années. Elle savait qu’il serait son principal opposant. Après l’avoir entendu déblatérer contre le Littéraire, n’entrant pas dans son jeu, le président du syndicat dit l’Ebéniste coupa court à ses prétentions et la décontenança en disant qu’il aurait souhaité que ses trois enfants l’aient comme professeur de français. Devant ce qu'il perçut comme une tentative d'intimidation, Le Littéraire  a tout de suite exigé une rencontre avec la nouvelle directrice pour tirer les choses au clair.
Cette rencontre a eu lieu et commença abruptement. L’Ebéniste avait dit au Littéraire que la Directrice le trouvait vulgaire. Attaquant de front le sujet, le Littéraire, avec audace lança : Prenons l’exemple des Français. Ils aiment dire à propos d’une femme : elle a un beau cul. Ou bien : elle a un gros cul. Pour moi, c’est le comble de la vulgarité. Sa Majesté répéta d’un ton déplaisant que l’étudiante adulte qui avait porté plainte le trouvait vulgaire ; il voulut savoir ce qu’elle considérait comme vulgaire et lui tendit un piège dans lequel elle est tombée, en lui demandant si, dans la citation suivante, Montaigne était vulgaire : Voici la citation des Essais : Plus le singe monte haut dans l’arbre, plus il montre son cul. Est-ce que c’est vulgaire ? Elle lui répondit : Non, ce n’est pas vulgaire. Pourtant, fit-il remarquer, Montaigne utilise le mot cul et si moi j’utilisais le mot cul en votre présence, vous diriez que je suis vulgaire. Si vous dites que ce n’est pas vulgaire, c’est par snobisme ! Et il ajouta, cinglant, la réplique qu’il avait préparée : Soit dit en passant, directrice générale, ce n’est pas très haut dans l’arbre. Il est utile de savoir que Montaigne traitait d’égal à égal avec les princes de son temps et n’était guère impressionné par le pouvoir. D’où l’utilité de lire les Essais et de s’en inspirer. Il est vrai qu’il a réussi le tour de force d’être en bons termes autant avec les protestants qu’avec les catholiques pendant les guerres de religion et après le massacre de la St-Barthélémy, il a servi d’intermédiaire dans des négociations. C’est un exploit que nous admirons et que nous aurions aimé imiter mais qui a été hors de notre portée dans notre collège étant donné les circonstances.
Plutôt que de suivre les conseils de Dale Carnegie dans Comment se faire des amis pour réussir dans la vie que l’abbé Jules Desrosiers lui avait fait lire à quinze ans, le Littéraire a préféré marcher sur les traces de Cyrano de Bergerac empanaché d’indépendance et de franchise. Moi, dit Cyrano, c’est à l’intérieur que j’ai mes élégances. La citation de Montaigne, la directrice ne l’attendait pas et elle a tenté de camoufler le geste de harcèlement que constituait sa rencontre avec le président du syndicat en couvrant le Littéraire de compliments du genre vous êtes brillant, vous êtes généreux, on voit que vous êtes très cultivé, vous êtes dynamique, flatteries qui le laissèrent de glace et lui rappelèrent La Fontaine : Le flatteur vit aux dépens de celui qui l’écoute. Comme dirait Séraphin Poudrier : Pas trop de fleurs, pas trop de fleurs. La saison est passée. Quand il refusa de participer à une session de formation donnée aux nouveaux élus au Conseil d’administration du collège, elle a bien vu qu’il lui serait impossible de le contrôler. Elle ne s’imaginait pas encore ce qui lui pendait au bout du nez. Lui non plus, d’ailleurs. Les compliments de la séduisante bourgeoise furent sans effet et elle s’en aperçut avec dépit.
Lors d’une deuxième rencontre, une semaine plus tard, pour lui remettre un chèque de 288 $ pour payer les frais d’un voyage à Québec, au printemps, au Comité provincial de français, comme coordonnateur de département, dépenses qu’avait refusé de payer le Directeur des études Rona ( qui a dû quitter son poste) elle a cité celui qu’elle a appelé ce cher Montaigne : Toute autre science est dommageable à celui qui n’a la science de la bonté. On le voit, chacun avait préparé sa citation. Il a alors compris son invitation à être ce bon gars que décrit Richard Desjardins dans une de ses chansons. Il n’en était évidemment pas question. Vulgaire ? N’était-ce pas une vacherie pour  le déstabiliser et l’empêcher d’être lui-même. Vous êtes fier dit le comte de Guiche. Vous l’avez remarqué, répond Cyrano.
Rien n’obligeait la directrice, certes, à choisir le Syndicaliste comme Directeur des ressources humaines. Et l’avenir a bien montré que ça n’aurait pas marché car elle aimait beaucoup trop les yes men, les cadres dociles et le Syndicaliste n’en était pas un. Mais tout est dans la manière. Quant à la convocation du président du syndicat pour critiquer le Littéraire, c’était un manque d’éthique professionnelle car elle aurait dû d’abord lui en parler. Dès le début de son mandat, au printemps et à l’automne 1997, elle a donc cherché le trouble. Comme on dit dans les analyses de l’action dans les romans, tels sont les deux événements déclencheurs d’un conflit où chacun des deux protagonistes a cru que l’autre voulait sa peau. Dans le récit qui va suivre, on vous épargnera le schéma actantiel de Greimas utilisé par des enseignant(e)s qui sentent le besoin d’imiter Thomas Diafoirus, ce personnage de Molière qui parlait latin pour passer pour un docteur en médecine. D’un côté, il y avait (les méchantes actantes) l’ex-professeure de chimie, directrice générale, l’avocate directrice des ressources humaines, l’ancien professeur de philosophie, directeur des études, l’ancienne professeure de Soins Infirmiers, Adjointe au Directeur des études, l’ancien professeur d’Informatique, adjoint à l’organisation scolaire, dit Grandpied le pas subtil, le tonitruant et perfide avocat local, certains membres du Conseil d’administration, Amable Beausapin, le technicien devenu professeur par la bande, certains enseignants en forte minorité qui ne respectaient pas les boycotts, qui étaient des money makers dans une situation de double emploi ou qui jouaient aux agents doubles qui se promenaient dans le collège comme des sous-marins soviétiques au moment de la guerre froide. Il y avait quelque chose de pourri au royaume du Danemark. Parlez-en à Alphonso Gagliano. De l’autre, il y avait (les bons actants) les quatre membres de l’exécutif du syndicat, le vice-président de la Fédération, (les adjuvants) les trois enseignants membres du Comité des relations du travail, en particulier la coordonnatrice du département de Soins infirmiers ; l’Ingénieur, l’autre enseignant membre du Conseil d’administration, l’avocat de la Fédération, les agents doubles qui jouaient sur tous les tableaux, qui faisaient surface et nous rapportaient les propos de la directrice générale, quelques enseignants militants syndicaux comme le coordonnateur du département d’informatique particulièrement lucide et ulcéré par l’International et l’Assemblée générale du syndicat des enseignants. Telles étaient les forces en présence dans une guérilla de tous les instants qui dura sept ans.
Pour porter un jugement sur l’ensemble des sept ans de l’exercice du pouvoir de cette directrice, la première chose qui frappe, c’est le roulement anormal du personnel cadre, roulement dont elle était en bonne partie responsable parce qu’elle demandait à ses collaborateurs de poser des gestes qui contrevenaient aux règles de l’éthique la plus élémentaire dans le but de nuire à ses adversaires et, en particulier, pour nuire au Littéraire. Il serait fort instructif de connaître les causes des départs de neuf cadres, soit un directeur des études, deux directrices des ressources humaines, un directeur des ressources matérielles, et, surtout, de cinq adjoint(e)s à la direction des études, dont certain(e)s ont refusé d’espionner le vice-président à l’information du syndicat local, le Littéraire, pour le déstabiliser à la suite de plaintes toujours anonymes qu’elles signalaient chaque semaine, elle ou son avocate, la directrice des ressources humaines, comme nous en a informé une adjointe qui a occupé ce poste pendant un an avant de revenir à l’enseignement de l’anglais. Au lieu d’intervenir, nous a-t-elle raconté, comme cette adjointe qui avait été directrice d’école primaire avant d’enseigner l’anglais exigeait de parler directement à la personne, parent ou élève qui, aurait porté plainte, elle n’en entendait plus parler. Après un an de refus d’intervenir, ne pouvant tolérer ce genre de procédé et ce genre de pression, et pour d’autres raisons aussi, Nicole quitta son poste de cadre et revint à l’enseignement de l’anglais. Après la convocation du président du syndicat, ces demandes d’intervention constituent la deuxième action objective de harcèlement selon la définition juridique de la loi sur le harcèlement qui s’applique depuis le 3 juin 2009 et en voici une troisième.
Les enseignantes du département de bureautique, qui n’ont pas spontanément tendance à s’opposer à l’administration, ont refusé carrément une demande de l'Adjointe Louise K. Cette Adjointe a été conjointe du député libéral sous Robert Bourassa, devenue membre du comité patronal national de négociation dont le mandat était de ne pas négocier et qui a conduit au décret de 2005, et que la Directrice générale a voulu nommer directrice des études sans passer par un comité de sélection.  Les enseignantes de bureautique ont refusé que cette Adjointe passe un questionnaire d’évaluation aux anciennes élèves du Littéraire, trois mois après la fin des cours, après les vacances d’été, pour lui donner de la matière pour corriger l’erreur grossière que la directrice a faite en l’accusant de ne pas avoir respecté son contrat en bureautique. Pourquoi? Parce qu'il  a répondu non à sa demande que les sept signataires (dont il faisait partie), membres du Comité des relations du travail renoncent à ce que se rende au Conseil d’administration une lettre (voir document 8) dénonçant sa volonté de continuer à couper nos salaires de 2.5% jusqu’en avril même si une entente nationale avait eu lieu qui convenait que la coupure devait cesser dès le premier janvier.  Exiger ce genre d’intervention d’une adjointe contre un enseignant à cause de son action syndicale est un abus de pouvoir et un manque d’éthique. Dans ces circonstances, comme en d’autres situations, ses manoeuvres portaient atteinte à l’intégrité des adjoint(e)s puisqu’elle leur demandait d’utiliser leur fonction à des fins partisanes. L’Adjointe au Directeur des études n’a pas à faire de harcèlement contre un enseignant mais comme elle faisait partie de la clique libérale, elle était d’accord pour intervenir en bureautique. Mais pas deux autres cadres, un adjoint et une adjointe qui ont quitté leurs fonctions. Pas surprenant qu’il y ait eu un tel roulement de personnel à la fonction d’adjointe ou d’adjoint au directeur des études. Leur résistance aux pressions de la directrice générale les honore et prouve qu’il existe encore dans les administrations de collèges des cadres qui ont une conscience et des principes.
Peu à peu, nous avons compris que les affrontements que nous vivions se situaient dans un contexte idéologique plus large. En effet, à une réunion de la Fédération autonome des syndicats (FAC), à l’occasion d’un exposé de Pascale Dufour, professeure au Département de science politique de l’Université de Montréal, nous avons reconnu l’idéologie de la Directrice et celle de la Fédération des cégeps. Cette idéologie dite libérale place l’individu au coeur de la vie sociale, ce qui implique et là on la reconnaît, la marginalisation des acteurs collectifs comme les syndicats par la réingénierie, la sous-traitance, les consultations-bidon, l’utilisation abusive des consultants, les privatisations et une politique de décentralisation vers les régions mettant l’accent sur les acteurs socio-économiques dont elle fait partie, comme présidente du Conseil d’administration du Centre Local de Développement (CLD), ce qui indique que, malgré sa retraite (forcée) du collège, elle est toujours active. Elle a été la cheville ouvrière de la création d’un fonds d’investissement régional (FIER) de 5.1 millions dont 3.4 millions venant du gouvernement libéral de Jean Charest qui sera administré par le CLD : elle espère pour elle-même un rendement de 10% pendant dix ans sur les 50,000 $ qu’elle a investis comme elle l’a déclaré candidement au journal local. Dans une société démocratique, rien n’interdit de critiquer cette idéologie libérale censée respecter la liberté d’expression, une liberté brimée par les menaces de poursuites en diffamation comme le journal local l’a vécu après la publication d’une lettre ouverte écrite par un citoyen qui contestait la façon de dépenser la subvention de 21 millions donnée par le gouvernement du Parti québécois pour le développement économique de la région. Répétons-le, la présidente du Conseil d’administration du CLD de sa région vient d’investir 50,000 $ dans un Fonds d’investissement régional (FIER) soi-disant à risque où le 1,7 million investi par des hommes d’affaires de la région est complété par 3.4 millions d’Investissement-Québec (le gouvernement libéral investit 2 dollars pour chaque dollar régional : 400 millions ont été prévus à cette fin dans le budget du ministre des finances). Les 5.1 millions sont administrés par le CLD pour le développement économique de la région et la création d’emplois. Tout ce beau monde espère un rendement de 10% sur investissement pendant dix ans. Ces informations se trouvent dans le journal local. Rien de malhonnête là-dedans : seulement quelques petits conflits d’intérêt. C’est l’économie libérale en marche qui permet à certains de profiter du système tout en se donnant des airs de travailler pour le bien commun, ce qu’ils font probablement malgré tout mais sans s’oublier. 
(L’ex-directrice a démissionné du CLD et a été nommée présidente du FIER du Bas-Richelieu.)
Avec l’accession au pouvoir de la directrice générale en 1997, on voit cette idéologie libérale en pleine application. Pendant sa première année en 1997-1998, des modifications de l’organigramme ont eu pour effet d’augmenter la tâche du personnel de soutien et de confier à certains cadres des doubles ou des triples tâches pour lesquelles ils n’avaient pas nécessairement de compétence. Alors ce ne sont pas de vraies économies car les erreurs  se multiplient et le désordre s'ensuit. On pourrait donner des exemples d’erreurs et de négligences de cadres surchargés, erreurs et négligences qu’il était de notre devoir syndical de dénoncer, ce qui a exaspéré la directrice générale qui se voyait contestée dans sa façon d’étirer les tâches des cadres. Elle a échoué dans sa tentative à laquelle nous nous sommes opposés avec succès de confier la cafétéria en sous-traitance à une compagnie privée au détriment de la qualité alimentaire des repas avec le danger que les sept employées perdent leur emploi, employées qu’elle a appelées avec condescendance des petites madames lors d’une réunion organisée pour tout le personnel afin, croyions-nous, que les deux points de vue sur la cafétéria puissent être entendus. Lors de cette réunion, la Directrice a été la seule à parler et le représentant de la coopérative qui gérait très bien la cafétéria, a dû se contenter de distribuer un document exprimant sa position en arrière de l’auditorium. Cela en dit beaucoup sur sa conception de la démocratie. Qu’elle seule prenne la parole avec l’aide d’un powerpoint, cela dépassait tellement l’entendement que tout le monde a figé. Un seul point de vue avait droit de cité, le sien. On a vu qu’elle aimait donner des cours magistraux. Le représentant de la coopérative, qui était un professionnel, n’insista pas car, de toute évidence, elle refusait de participer à un débat. A cette occasion, réunis à l’auditorium, plus d’une centaine de membres du personnel, nous avons tous été trop polis en tolérant son monologue. Nous n’avons pas fait d’esclandre pour ne pas faire de diversion car nous savions que personne ne serait influencé par son exposé qui n’a eu aucun impact. La très forte majorité des membres du personnel ont continué à penser qu’elle n’avait pas d’affaire à privatiser la cafétéria qui était bien administrée et qui offrait d’excellents services alimentaires depuis 20 ans et à des prix  raisonnables. Cette réunion était la preuve que ce n'est pas par le dialogue  que nous pouvions protéger les acquis mais par l'affrontement. Ce fut une lutte que le syndicat a gagnée : la cafétéria ne fut pas privatisée et les tentatives de la directrice de contrôler l’information sur ce sujet furent un échec. Elle aurait dû en tirer une leçon. 
Quand le stationnement a cessé d’être gratuit et que La Direction a multiplié les frais afférents payés par les élèves malgré les protestations de l’Etudiante, Lorraine Bourret, porte-parole de l’Association étudiante, on a qualifié son administration de mercantile, et l’Association étudiante a transformé le slogan l’étudiant, c’est important par l’étudiant, c’est payant, affiche qui a été saisie par le subtil Grandpied dans les plats, l’adjoint à l’organisation scolaire qui lui était tout dévoué dans l’espoir de devenir Directeur des études, ce qui n’arriva pas, heureusement. Cet adjoint de 6’ 4” serviable et aux multiples talents est aujourd’hui directeur des ressources humaines dans un gros collège de Montréal, rue St-Hubert, au nord de la Métropolitaine. Parlant de liberté d’expression, le syndicat a été obligé de faire un grief et de le gagner suite à la sentence de l’arbitre Gilles Lavoie pour avoir le droit de se servir des casiers des enseignants sans que l’administration puisse intercepter nos bulletins d’information comme elle l’a fait pour notre Complément à l’Info-CA qui faisait très mal parce qu’il décrivait en détail le fonctionnement ubuesque d'une réunion du Conseil d’administration sous sa direction à travers un exemple, le dossier de la cafétéria. Suite à l’évaluation négative que les enseignants ont faite de son premier mandat, elle a engagé une firme privée qui a échoué dans sa mission de redorer son image. Plus tard, au coût de 73,600$, une firme privée a fait une étude pour nous apprendre ce que nous savions déjà à savoir que la clientèle se trouvait à l’ouest du collège, du côté de Varennes.
Auteur des questionnaires détaillés et responsable du processus de son évaluation qui a conduit 70% des enseignants à ne pas recommander son renouvellement de mandat pour cinq autres années, l’exécutif syndical a dû subir son hostilité permanente. Par exemple, Grandpied a donné machiavéliquement au Littéraire une classe au rez-de-chaussée qui serait troublée par des bruits de construction qui provenaient de travaux dans le sous-sol pour le programme en environnement-santé-sécurité, ce qui, inévitablement, susciterait des sarcasmes de sa part et l’impossibilité de donner des cours magistraux, cours magistraux qu’une lettre non officielle du Directeur des études réclamait de lui ainsi qu’une injonction de cesser ses attaques contre l’administration. Un certain après-midi, il a reçu la visite inopinée de deux cadres féminines dans sa classe, sans avertissement, trois semaines avant les procès, avec un questionnaire à remplir par les élèves afin de prouver que le méchant syndicaliste ne respectait ni l’administration, ni ses élèves. Les élèves, perspicaces, déjà avertis que l’administration en voulait à leur professeur, à la vue des questions, comprirent le but de la démarche patronale et ne firent pas de réponses qui pourraient justifier une mesure disciplinaire, suspension ou autre, de l’administration contre lui. Cette solidarité étudiante en temps de crise fut fort appréciée par le professeur de français qui y a vu un effet bénéfique de son enseignement et confirma sa position de base dans la vie à savoir qu’il y a des avantages à s’adresser à l’intelligence des gens et à leur faire confiance, surtout les jeunes. Cet appui étudiant est un souvenir fort émouvant pour le Littéraire. Après la compilation des réponses de ses élèves, au grand déplaisir de la Directrice générale, le Directeur des études a écrit une lettre d’excuses à l’enseignant pour l’avoir dérangé et n’a pu s’empêcher de constater, par écrit, à la demande du Littéraire qui cherchait réparation pour l'injure, que ses élèves l’estimaient et considéraient qu’il était un professeur de littérature compétent et dynamique, ( message à certains collègues jaloux, envieux, hypocrites et sournois) ce qui était normal puisque par ses méthodes et son style d’enseignement, après avoir étudié les plus beaux poèmes de François Villon, il venait de leur faire comprendre et apprécier un roman difficile du XVIIè siècle, La Princesse de Clèves de Madame de La Fayette et qu’il était en train d’analyser avec eux Le Misanthrope, de Molière, des classiques qui, comme par hasard, traitent du thème de la sincérité dans les relations hommes-femmes et dans la vie sociale. Cette lettre d’excuses accompagnée d’un jugement favorable sur son enseignement a été précédée d’une rencontre à Varennes où le Directeur des études lui fit faire, aimablement, le tour du propriétaire, ce qui le convainquit qu’au fond, bien que parfois obstiné, c’était un honnête homme et que le vrai problème, ce n’était pas lui. Cette visite de deux cadres dans sa classe, c’est la quatrième action de harcèlement contre le Littéraire, lui, le vice-président du syndicat, la plus grave, après la convocation du président du syndicat en août 97, les demandes répétées d’intervention et d’espionnage faites à une adjointe et la tentative ratée de l’Adjointe aux programmes de passer un questionnaire dans son ancienne classe de bureautique. Vous avez bien lu, la quatrième.
La Directrice avait aussi envoyé un professeur d’éducation physique devenu temporairement aide pédagogique dans sa classe de bureautique pour venir écornifler sous prétexte de vérifier la présence d’une élève en classe avec laquelle il s’entendait bien (et qui, soit dit en passant, était danseuse nue dans un club d’un petit village de la région et qui l’avertit qu’une étudiante adulte (une autre) parlait contre lui dans son dos pendant les pauses). Cet enseignant-espion a obtenu une prime de séparation d’une année de salaire quand il a pris sa retraite... Dans cette classe de bureautique dont le but était d’améliorer le français écrit, il avait donné un sujet d’examen final plutôt original. En voici le sujet : Vous êtes la secrétaire d’un grand éditeur de Montréal. Vous écrivez à Gallimard pour lui demander de publier en un seul volume le Survenant et Marie-Didace de Germaine Guèvremont. Vous justifiez votre demande en montrant que Marie-Didace est la suite du Survenant et en expliquant que les deux romans n’en font qu’un puisque ce sont les mêmes personnages et qu’après le départ du Survenant, on peut trouver une trentaine de références au dieu des routes dans Marie-Didace. A la mi-session, voici le sujet donné pour un autre travail. Le président de Cascades est en voyage en France. Pendant ce temps, Richard Desjardins sort son film L’erreur boréale. Comme secrétaire, vous écrivez un rapport sur le contenu de ce film pour que votre boss, de retour de voyage, sache quoi répondre aux questions des journalistes. Comme vous voyez, dans ce cours de français écrit, on était loin de l’étude des anglicismes ou du langage spécialisé que doit connaître toute bonne secrétaire.  Malgré l'intérêt des élèves, il ne donna ce cours qu’une seule fois. Le Grammairien (auteur d’une grammaire) prit sa succession. Celui-ci avait de la difficulté à obtenir l’attention de ses élèves plus d’une demi-heure. Une fois, exaspéré, il lança sa craie au visage d’une bavarde. Voyez à quelles situations tendues mènent les cours magistraux.  Remercions le Grammairien de cette confidence qui l'humanise…et qui nous a bien fait rire. Une anecdote:  un lundi matin, la soeur de Marc-André Fleury qui a été gardien de buts de Pengouins de Pittsburg jacassait en arrière de la classe et me dérangeait. Je suis allé la voir et j'ai mis un deux dollars sur son bureau en lui disant: Va à la cafétéria avec ton amie et continuez à vous raconter votre fin de semaine en prenant un café que je vous offre. Non non, protesta-t-elle, on va rester tranquilles…pendant que toute la classe riait.
Revenons au Littéraire et à la visite non annoncée de deux cadres féminines que nous qualifions à juste titre de complot qui aurait pu aboutir à une suspension ou à une autre mesure disciplinaire. Cette mauvaise surprise  qui créait un milieu de travail néfaste se produisit pendant que les quatre membres de l’exécutif syndical devaient faire face aux tribunaux suite à des poursuites judiciaires de 80,000$ (le 15 mai 2001) pour diffamation à cause d’une lettre envoyée au cent membres du syndicat qui contenait une critique du directeur des études intitulée la double incompétence sur les examens de reprise et la politique d’évaluation du collège. (Six mois plus tard, le directeur des études faisait les modifications que nous avions demandées.) La poursuite a été précédée d’une mise en demeure qui prétendait que les mots manque de jugement, et doublement incompétent utilisés dans un texte envoyé à tous les enseignants le 24 janvier 2001 pour qualifier une décision du directeur des études sur les examens de reprise étaient diffamatoires et portaient atteinte à sa réputation. Dans cette mise en demeure datée du 31 janvier 2001, le Collège nous demandait de retirer ces propos et de nous excuser et nous donnait cinq jours ouvrables pour le faire. L’exécutif du syndicat a présenté des excuses et retiré les propos litigieux à deux reprises mais en vain car l’administration tenait à maintenir un rapport de forces par une poursuite aux frais des payeurs de taxes. C’est ce qu’on appelle une poursuite stratégique, une SLAPP, une poursuite-bâillon.
Cette poursuite fut suivie d’une autre de 170,000 $ (le 8 août 2001) pour diffamation à cause de propos que le Littéraire, vice-président du syndicat, aurait tenus comme membre du Conseil d’administration lors d’une réunion du Conseil du 19 juin 2001. A ce Conseil dont il était membre comme représentant des enseignants, le Littéraire avait devant lui une fiche qu’il a conservée, une fiche préparée minutieusement pour poser à la Directrice une question précise qui est, mot à mot, la suivante : Lors de l’accueil du personnel, l’automne dernier, devant trois de mes collègues, vous vous êtes engagée à acheter des ordinateurs pour faire du multi-média en Arts et Lettres. Or, il n’y a rien de prévu dans le budget du collège. Vous n’avez donc pas respecté votre engagement. C’est ce qui est écrit sur la fiche et c’est ce qu’il a lu. Il a ajouté ( ce qui n’était pas prévu et ce fut une erreur, évidemment) : vous étiez à jeun ! ce qui est, selon notre interprétation, un éloge indirect du vin puisque ça voulait dire que cet engagement qui répondait à un besoin urgent en Arts et Lettres, lors de l’accueil du personnel, la directrice générale ne l’avait pas pris dans l’enthousiasme que peuvent provoquer quelques verres de bon vin. Et que, par conséquent, elle devait le respecter. Ce n’est pas ce que la directrice a compris. La fumée lui sortant par les oreilles en plein Conseil d'administration devant plus de 25 personnes, courroucée, elle a demandé à l’enseignant de retirer ses propos ce qu’il a fait sur le champ tout en étant fort surpris de sa réaction. Plus tard, lors de l’interrogatoire pré-procès, au palais de justice de Sorel, le retrait des paroles mal interprétées a été qualifié par elle de frivole au sens juridique du terme : de toute évidence, l’avocat local avait donné des conseils. Lors de cet interrogatoire pré-procès soigneusement noté par une sténo et dont nous avons le texte intégral daté du 31 octobre 2001, elle a eu le culot de prétendre que le Littéraire avait dit : Cette fois-là, vous étiez à jeun en ajoutant curieusement et je le jure comme pour montrer qu’elle était consciente de la gravité de cette phrase et son caractère incriminant et elle dit que cette phrase était en relation avec une réunion de département. Selon elle, sa promesse d’acheter des ordinateurs aurait été faite dans une réunion du département de français et c’est en se référant à cette réunion de département qu’il aurait dit : Cette fois-là, vous étiez à jeun. Selon le Littéraire, cette fois-là, il ne l'a jamais dit.   C'est une invention à mettre au crédit du génie créateur du perfide trio  Sa Majesté-l'avocat local et l'avocate béèmdoublevé.
Cette version des faits, on peut bien le dire, ne tient pas debout. En effet, si l’enseignant s’était référé à une réunion de département où il n’y a jamais de boisson, comment aurait-il pu employer l'expression à jeun? Ces faits font appel à la logique, à une logique implacable. Les amateurs de romans policiers et de logique auront compris pourquoi, plus tard, l’enseignant a osé affirmer dans une réunion des quatre membres de la Direction et des trois autres membres de l’exécutif syndical qui étaient présents lors du fameux Conseil d’administration du 19 juin 2001 que le témoignage de la directrice générale était une fabrication. Ce n’était pas la logique qui dominait dans son témoignage du 31 octobre. Nous savons que l’idée de fabrication implique quelque chose de volontaire. Mais à la réunion précitée, c’est ce que le Littéraire a dit devant sept témoins et non des moindres et l’exactitude exige que nous le rapportions tel quel. L’enseignant a pensé que la phrase incriminante : Cette fois-là, vous étiez à jeun a été inventée de toutes pièces par des gens que Louis-Ferdinand Céline aurait invectivés. Il fallait ajouter : cette fois-là, parce que ce qui avait été dit par l’enseignant au Conseil d’administration du 19 juin 2001 ne justifiait pas une poursuite en diffamation et un procès, c’est aussi simple que ça. Il a peut-être eu tort de penser cela mais il l’a pensé. Le Littéraire a signé un affidavit : Je n’ai pas dit cette fois-là. Et cinq témoins étaient prêts à le signer. Nous pourrions donner les noms de ces cinq enseignants présents au Conseil d’administration du 19 juin 2001 qui étaient prêts à jurer que le Littéraire n’avait jamais dit : cette fois-là. Les formulaires étaient prêts mais ces affidavits ne furent pas signés car entre temps, une entente hors cour a été signée. Si le procès avait eu lieu, pour que le Littéraire soit condamné pour diffamation, il aurait donc fallu que les adversaires du Littéraire fassent de faux témoignages. Ces faux témoignages auraient pu conduire à une erreur judiciaire.
De plus, le contexte n’était pas une réunion de département, comme la directrice générale l’a prétendu, mais un accueil du personnel au hot-dog comme avait dit avec mépris le Grammairien, au vin et à la bière. Comme l’enseignant craignait une erreur, il avait noté les circonstances précises de son intervention dans une lettre envoyée au début de juillet aux 19 membres présents  au Conseil d’administration du 19 juin 2001,  lettre remise en mains propres à la secrétaire de la directrice, pour éviter que la mémoire de la directrice ne soit défaillante. Malheureusement, elle n’a pas tenu compte des précisions contenues dans cette lettre que l’on peut lire dans les documents. De toutes façons, il était impossible que l’enseignant se réfère à une réunion du département de français car les questions regardant le programme d’Arts et Lettres ne sont pas discutées en département mais dans des réunions de programme. Or, le Littéraire n'assistait pas aux réunions du programme d'Arts et Lettres, programme dominé par le Théâtral et son ami St-Félix-de-Valois.  C'est un détail  capital que les amateurs d'Hercule Poirot ou de Columbo ou de Sherlock Holmes apprécieront.  Il est tout aussi impossible qu’il ait dit : Cette fois-là puisque cela supposerait qu’il pensait qu’habituellement, au jour le jour, la directrice n’était pas à jeun dans l’exercice de ses fonctions, ce qui est faux puisqu’il n’avait aucune raison de penser cela. et qu'il ne le pensait pas. Il lui a déjà dit en public, dans une rencontre précitée entre les quatre membres de la Direction du collège et les trois autres membres de l’exécutif du syndicat : pour nous, le témoignage de la directrice lors de l’interrogatoire pré-procès ne correspond pas à ce qui s’est dit. Il fallait qu’il y ait beaucoup d’émotivité dans l’air au Conseil d’administration du 19 juin 2001 pour qu’une référence au vin normalement consommé lors d’un accueil du personnel soit métamorphosée en attaque personnelle et en diffamation. Et, en effet, comme la directrice et ses complices avaient décidé lors de cette réunion d’exclure l’enseignant du Conseil d’administration (la preuve, on avait ajouté, le soir même, un point à l’ordre du jour : implication des membres du CA), la directrice générale était un peu agressive et fébrile. Elle avait peur de ne pas avoir quorum. Mais, plus tard, à tête reposée, pendant les vacances, au moment de la rédaction de la poursuite en diffamation de 170,000 $, ça prenait beaucoup d’imagination créative (ou de malice, ou de malveillance) pour transformer un éloge du vin en insulte diffamatoire. Pendant ce temps, dans la région circulait cette rumeur que la directrice générale s’était fait insulter pendant une réunion du Conseil d’administration. Et par qui, pensez-vous ? Comme aurait bien dit Balzac, en province, une semblable aventure s’aggrave par la manière dont elle se raconte. Personne ne savait avec exactitude ce qui s’était vraiment dit mais les mémérages allaient bon train. Comme d’habitude, en province ou en région. Dans la poursuite, la somme d’argent réclamée était la conséquence du tort causé à la réputation de l’éminente éducatrice et femme d’affaires dans la région ; nous avons donc demandé que notre mise au point faite devant les quatre membres du Comité de direction reçoive la même publicité que les prétendus propos diffamatoires.  En vain. Une question : la déformation des propos de l’enseignant était-elle faite de bonne foi ? Les deux erreurs complémentaires qui l’incriminaient étaient-elles volontaires ou involontaires ? Est-ce possible que ces deux erreurs aient été involontaires ? Chacun peut avoir son opinion là-dessus et nous croyons que vous avez compris quelle est la nôtre. 
Remarquons encore une fois que la version de l’enseignant, qui est différente de celle de la directrice, est la même que cinq autres témoins qui étaient présents comme observateurs au Conseil d’administration du 19 juin 2001 et qui connaissaient d’avance la question sur les ordinateurs qui serait posée puisqu’ils en avaient parlé en détail en soupant chez St-Hubert, avant la réunion du Conseil d’administration. Nous insistons. Peu après le 19 juin 2001, elle a reçu en mains propres une lettre qui précisait toutes les circonstances de la question posée au Conseil d'administration. Elle l’a ignorée. Pourquoi ? Nous lui disons : Etes-vous prête, aujourd’hui, madame l’ex-directrice, à admettre que votre témoignage du 31 octobre 2001 contenait deux erreurs ? C’était, objectivement, des erreurs. Néanmoins, quant à nous, la conclusion est double et incontournable.
Première conclusion : pour justifier un procès en diffamation, on a été obligé de modifier les propos tenus (on a ajouté les mots Cette fois-là) et de changer la circonstance ( une réunion de département et non un accueil du personnel) à laquelle on se référait. 
Deuxième conclusion : si on se base sur ce qui a été dit et sur la référence à l’accueil du personnel, il n’y avait pas matière à procès. Que pensez-vous, madame, de cette logique implacable ? La prétention de votre avocat que l’enseignant a dit quelque chose qui laissait entendre que vous étiez  paquetée quand vous exerciez vos fonctions, comme dirait l'avocat dans Seinfeld, est absurde, grotesque, ridicule et sans fondement. L’enseignant membre du conseil d’administration n’a jamais pensé cela, ne pense pas cela, et, par ses paroles, il n’a jamais laissé entendre une telle fausseté. Que cela soit bien clair ; dans l’exercice de vos fonctions dont nous avons été témoin, vous avez toujours été en pleine possession de vos moyens. Voilà qui devrait vous rassurer. N’ayez aucun doute là-dessus. Ne peut-on pas dire qu’en retirant la poursuite, vous avez reconnu que vous vous étiez trompée. Que d’argent (50,000 $), de temps et d’énergie gaspillés ! Voilà ce que nous nous préparions à dire en cour devant le juge. C’est sans doute pour éviter d’avoir à faire face à ses contradictions que la Directrice a décidé de retirer sa poursuite. Le procès aurait contribué encore plus à défaire cette image de femme d’action irréprochable, dévouée et vertueuse qu’elle se donnait beaucoup de mal à construire.   
Le paradoxe, c’est que cette poursuite contre un enseignant de plus de trente ans d’expérience, essayiste qui a publié cinq livres, docteur en lettres de l'Université Laval, militant indépendantiste depuis 1965, membre du Conseil d’administration et vice-président du Syndicat des enseignants, cette poursuite basée sur des paroles qui n’ont pas été dites ainsi que l’autre poursuite contre l’exécutif du syndicat à cause d’une critique légitime du Directeur des études ont plus fait pour nuire à la crédibilité professionnelle de la directrice générale et du directeur des études que tout ce que nous avons dit et écrit en sept ans. Car il y avait cinq personnes fiables dont l’Infirmière, la coordonnatrice du département de Soins infirmiers qui a beaucoup de crédibilité, qui ont été témoins de ce qui s’est vraiment passé le 19 juin 2001 et qui n’ont pas manqué de rétablir les faits auprès de tous les membres du personnel, y compris, bien sûr, les enseignants qui voulaient savoir et qui finançaient notre avocat. Voilà pourquoi les propositions d’appui étaient adoptées à l’unanimité par les enseignants présents aux assemblées syndicales pendant les moments forts du conflit avec un taux de participation exceptionnel de plus de 80% et que plus de 90% des enseignants respectaient les boycotts. Car si les enseignants avaient cru que leur représentant au Conseil d’administration avait eu une conduite inappropriée, ils lui auraient demandé de démissionner, ce qu’ils n’ont pas fait ; au contraire, ils l’ont massivement appuyé. Et si le Littéraire avait tenu des propos diffamatoires, il se serait cru indigne de représenter les enseignants au Conseil d’administration du collège et il aurait démissionné de lui-même sans autre forme de cérémonie. Mais il ne pouvait accepter d’être accusé faussement. Il n’était pas question de se laisser diffamer. Il fut obligé de se défendre. Dans ces circonstances, il était malheureusement impossible d’adopter l’attitude conciliante et admirable de Montaigne.
Heureusement pour elle que la Directrice  a accepté qu'une entente hors cour soit signée.  Il est temps de faire ici une révélation. Seul le vice-président de la FAC Daniel Lussier était au courant. Le Littéraire avait vu plusieurs fois le film de Brian di Palma sorti en 1990 dont le scénario s'inspire du roman de Tom Wolfe intitulé The Bonfire of the vanities (1987) (le Bûcher des vanités) mettant en  vedette Tom Hanks, Melanie Griffith, Bruce Willis et Morgan Freeman dans le rôle du juge. Le juge s'adresse à la foule à la fin du procès et dit: La justice ne peut être rendue s'il y a de faux témoignages. Vivez avec honnêteté (decency) et respectez les principes que votre grand-mère vous a enseignés. Melanie Griffith, la maîtresse du trader de Wall Street Tom Hanks, a fait un faux témoignage. Elle a dit que c'était Tom Hanks qui était au volant de la Mercedes qui a gravement blessé un noir et qu'elle a voulu appeler la police. Or, c'était elle qui était au volant et c'était elle qui ne voulait pas appeler la police. Un enregistrement avait été fait de ses propos parce que le propriétaire voulait prouver que sa locataire n'habitait pas l'appartement et le sous-louait. Il avait fait installer un dispositif pour enregistrer les conversations. Ce film donna l'idée au Littéraire de placer un petit magnétophone dans sa serviette pour enregistrer les échanges controversés qui ne manqueraient pas d'avoir lieu pendant le fameux conseil d'administration du 19 juin 2001. Voici ce que l'enregistrement révèle. Le Littéraire a dit: Lors de l’accueil du personnel, l’automne dernier, devant trois de mes collègues, vous vous êtes engagée à acheter des ordinateurs pour faire du multi-média en Arts et Lettres. Or, il n’y a rien de prévu dans le budget du collège. Vous n’avez donc pas respecté votre engagement. Vous étiez à jeun ! Point d'exclamation. La directrice avait fait une Melanie Griffith d'elle-même. Pas de Cette fois-là et pas de réunion de département. S'il y avait eu un procès, au moment de la divulgation de cet enregistrement, on ne saura jamais si la Directrice qui avait suivi Théâtre 601 se serait évanouie…comme dans le film. On comprendra que la possession de cet enregistrement par le Littéraire contribua grandement à diminuer le stress qui accompagne inévitablement des poursuites. 
Après ces poursuites qui nous déstabilisaient, après la publication d’un Huissier reproduisant le Rapport d’évaluation de la directrice générale, Sa Majesté a fait l’erreur de traiter les quatre membres de l’exécutif de menteurs dans un écrit daté du 28 janvier 2002, distribué à tout le personnel et signé : La Direction. Elle nous a diffamés en continuant à nous traiter de diffamateurs avant que la chose ne soit jugée ; elle nous a aussi diffamés en nous traitant de menteurs. Nous avons alors appliqué le grand principe du droit romain cité par le frère de l’Ebéniste qui est avocat lors de l’audition d’un grief : ce qui est bon pour minou et bon pour pitou et comme elle nous a insultés en prétendant que nous avions écrit des propos mensongers, cela lui a valu, à son tour, à elle, aux trois autres membres de la Direction ainsi qu’au président du Conseil d’administration, dit le Chasseur, une mise en demeure avec menace de poursuites du syndicat et le plaisir exquis d’une visite du huissier, un genre de visite qui, en région, ne passe pas inaperçue et qui fait jaser. Cette mise en demeure de se rétracter et de s’excuser ainsi que des griefs et un recours au Tribunal du travail pour anti-syndicalisme devaient peser lourd dans la balance quand elle et le directeur des études ont enfin décidé de retirer les deux poursuites lors d’un règlement hors cour signé par les parties le 30 octobre 2002.
Quand on essaie de comprendre ce qui a pu pousser la Reine du décorum à sortir l’artillerie lourde juridique, il faut nécessairement soulever le problème de son évaluation par le syndicat des enseignants. Vers la fin de son premier mandat, comme cela est prévu dans les règlements, le Conseil d’administration nous a demandé notre avis pour savoir si on devait lui donner un deuxième mandat de cinq ans. Même si elle contrôlait les principaux lieux de décision, les diverses étapes de son évaluation ont donné lieu à une guerre de relations publiques et déclenché chez elle des mécanismes psychologiques d’autodéfense étonnants. Personne n’aime être évalué surtout quand on pense que l’évaluateur est hostile. Les enseignants en savent quelque chose surtout les jeunes pendant leurs trois premières années avant d’obtenir leur permanence ce que François Legault a l'air d'ignorer. La perspective de son évaluation l’a tellement traumatisée que le jugement critique porté par les enseignants sur son premier mandat commencé en 1997 a fait d’elle une redoutable adversaire. Elle a alors décidé que les quatre membres de l’exécutif syndical étaient des ennemis à abattre. Nous étions des traîtres qui voulaient la chute de Sa Majesté. Elle nous a déclaré la guerre et nous n’avons pas eu le choix : nous sommes devenus de plus en plus des warriors, ce qui devait éventuellement et fatalement nous nuire politiquement comme elle le souhaitait car il était inévitable qu’un certain nombre de nos membres partisans du double emploi et des refus de priorité conduisant au congédiement de jeunes professeurs, par ailleurs amadoués par un coûteux programme de prêt d’ordinateurs fait aux enseignants  et frustrés du byecott des partys de Noël, du byecott des remises de diplômes ou du byecott d'autres activités sociales, choqués (avec raison) de ne pas bénéficier des nouvelles échelles de salaires accompagnant l’acceptation de cinq heures supplémentaires par semaine, il était inévitable, disions-nous, qu’ils nous rendent responsables du mauvais climat attendu que nous pouvions difficilement nous expliquer parce que pour se défendre contre des accusations de diffamation, à la fois en Cour supérieure et devant le Comité d’éthique du Conseil d’administration, vous êtes obligé de révéler des faits ou des propos qui apportent de l’eau au moulin de vos accusateurs sans parler du fameux sub judice. Si vous dites : On m’accuse d’avoir dit telle ou telle chose mais ce n’est pas ce que j’ai dit, vous répandez les propos qualifiés de diffamatoires et vous vous coulez. Nous pouvions rétablir les faits dans des conversations privées mais pas en public et par écrit. C’est très embêtant comme situation. Des poursuites en diffamation, ça trouble le cours normal de la vie sociale. Ça pousse au silence et à la peur. 
(Nous avons dû payer le prix de la lutte que nous avons menée : formé de gens qui n’ont pas été solidaires et qui n’ont pas respecté les boycotts, un nouvel exécutif syndical dont la Directrice a souhaité et encouragé l’élection a été élu après avoir exploité avec succès le malaise créé. Nous sommes donc devenus de simples soldats appelés les vieux par un démagogue, Amable Beausapin, un technicien en électrotechnique qui aurait dû rester technicien. Depuis lors, c’est le calme plat après la loi 142 de décembre 2005 imposant les conditions de travail aux 500,000 employés du secteur public et une situation difficile créée par une baisse de clientèle dans certains programmes techniques puisqu’on s’en va vers une clientèle d’environ 900 élèves alors que, dans les belles années, il y avait plus de 1200 élèves. Après deux ans, Amable le félon, mis en disponibilité, a quitté l’exécutif du syndicat des enseignants. Assuré de 80% de son salaire avec une petite tâche, pourquoi ferait-il du bénévolat syndical ? Sa vocation syndicale comme enseignant aura été de courte durée. Comme technicien en électro, il avait été plus tenace. Sa mission avait été de battre l’équipe syndicale qui avait donné tant de fil à retordre à son amie l’Avocate de service. Une fois sa mission accomplie, Amable Beausapin est retourné dans l’ombre d’où il n’aurait jamais dû sortir. Il a pris sa retraite en juin 2008. Qu’il continue à se reposer et à fréquenter l'Université, la taverne locale, pour rencontrer tous les vendredis ses acolytes.)
Ces poursuites en Cour supérieure étaient machiavéliques, si on tient compte de l’aspect financier avec les frais d’avocat, les nôtres et ceux de la partie adverse (avec dépens) si nous avions perdu et les menaces de grosses amendes puisque les poursuites visaient personnellement chacun des quatre membres de l’exécutif du syndicat. Même après le règlement hors cour, quand un membre de l’exécutif du syndicat, l’Irlandais pour ne pas le nommer, voulut faire un emprunt personnel à la banque, il constata qu’il restait des traces des poursuites dans son dossier de crédit. La Fédération autonome avait beau tout financer, cela mettait beaucoup de pression sur chacun de nous. Ce qui nous fait conclure qu’en théorie les enseignants ont le droit d’évaluer les hors-cadres, c’est-à-dire la directrice générale et le directeur des études, qui sont les personnes les plus puissantes d’un collège mais, qu’en pratique, c’est un exercice périlleux qui peut conduire à des représailles. Surtout quand on se permet d’être mordant comme dans le rapport  d’évaluation du directeur des études qui nous a poursuivis (ayant quitté notre collège, il a occupé le même poste dans un autre cégep, lui dont on avait supposément détruit la réputation et ruiné la crédibilité et, ensuite, il a été nommé directeur général d’un collège ; si nous ne l’avions pas diffamé, il serait aujourd’hui ministre de l’éducation), rapport d'évaluation, disions-nous, qui a tout déclenché, où nous avons demandé selon une formule dont l’Irlandais était très fier qu’il cesse de faire la belle devant sa souveraine, donc qu’il cesse d’être une marionnette à qui la directrice générale coupait fréquemment la parole pendant les conseils d’administration, ce qui nous énervait beaucoup en tant que mâles, nous l’avouons pour faire plaisir aux féministes. Nous ne nous attendions pas à ce que cette  métaphore, faire la belle devant sa souveraine trouvée par l’Irlandais provoque une réaction aussi démesurée car, après tout, comme disait le maire Jean Drapeau suite au Vive le Québec libre du général De Gaulle en 1967, sur le balcon de l’hôtel de ville de Montréal, le mot chien n’a jamais mordu personne. Après avoir pris connaissance de notre rapport d’évaluation du Directeur des études qui l’attaquait directement, quand la directrice générale a appris que ce rapport qui devait rester confidentiel avait été lu par l’Irlandais devant trente enseignants réunis en assemblée générale syndicale, elle a vu le danger et comme elle savait qu’elle serait évaluée à son tour, elle a redouté avec raison notre évaluation et elle a décidé de passer à l’offensive. Pour nous donner des armes, nous avons lu L’Art de la guerre du Chinois Sun Tzu rédigé au 4è siècle avant notre ère et cité dans le film Wall Street. Nous avons pris bonne note que, selon Sun Tzu, l’art de la guerre est fait de stratégie et de ruse et qu’il est basé sur la duperie et le mensonge.
Nos références à la royauté avec des citations en exergue des Huissiers, bulletin d’information syndicale ainsi nommé en référence aux visites des huissiers à nos domiciles respectifs, parfois à sept heures du matin, en plein été, ont provoqué chez elle une exaspération croissante. Par exemple, dans le premier numéro du Huissier, daté du 7 décembre 2001, on pouvait lire, en exergue, la citation suivante : L’humeur ambitieuse de la reine lui faisait trouver une grande douceur à régner écrit Madame de La Fayette au début de La Princesse de Clèves à propos de Catherine de Médicis. Cette ironie devait vite devenir, pour elle, insupportable. Pour répondre à l’exigence par mise en demeure donc par lettre d’avocat de retirer nos propos et de nous excuser, nous avons écrit une lettre datée du 26 mars 2001. Quand nous avons cité Montaigne, le vase déborda. Montaigne écrit dans le livre premier de ses Essais, au chapitre trois : Nous devons la sujétion et l’obéissance également à tous rois, car elle regarde leur office : mais l’estimation, non plus que l’affection, nous ne la devons qu’à leur vertu. Donnons à l’ordre politique de les souffrir patiemment indignes, de celer leurs vices, d’aider de notre recommandation leurs actions indifférentes pendant que leur autorité a besoin de notre appui. Ici, il ne fallait évidemment pas prendre le mot vices au pied de la lettre. Dans notre contexte, il ne s’agissait pas de se référer aux sept péchés capitaux du petit catéchisme mais plutôt à l’ensemble de son oeuvre, à la totalité des comportements que nous critiquions. Cette citation les enragea et leur fit rejeter notre lettre d’excuses et de rétractation. Nous n’étions pas sincères puisque nous continuions, à travers Montaigne, à les insulter en les traitant d’autorités indignes qui nous obligent à celer leurs vices et qui ne méritent pas notre estime et encore moins notre affection puisque nous doutons de leur vertu. C’était provocateur. Le mot chien n’a jamais mordu personne, bien sûr, mais il y a quand même des mots qui mis ensemble dans une phrase ne laissent pas indifférents même s’ils sont de 1592, date de publication des Essais. Nous nous en sommes rendus compte devant le Tribunal du travail en voyant la réaction outrée de l’avocate de service béèmdoublevé quand elle revint sur cette citation de Montaigne et le sourire amusé de la juge  Louise Verdone.
De même, quand le représentant des enseignants (Le Littéraire) a été chassé du Conseil d’administration suite à une plainte d’un des valets de la Directrice, la référence à Alcibiade, ostracisé d’Athènes, exaspéra car elle obligea à consulter un dictionnaire des noms propres comme le remplacement du mot incompétence (ce mot étant, paraît-il, diffamatoire) par le mot impéritie exigea l’usage du dictionnaire des noms communs. Lui et ses Grecs ! lança le défunt président du Conseil, honnête homme pacifique avant que le plus important agent d’assurances de la région André L. j'assure, je rassure ne déchire théâtralement en plein conseil d’administration notre bilan de sa première année qui prévoyait que la deuxième année se déroulerait sous les auspices de Mars et non de Vénus étant donné que, comme elle l’avait écrit elle-même, le coup de foudre était terminé, expression qui révélait qu’elle concevait ses rapports avec le personnel comme des rapports passionnels, ce qui explique bien des choses sur son comportement. Ce bilan de l’An I valut une lettre disciplinaire au dossier des deux auteurs, le Politique et le Littéraire, à ce moment-là membres du Comité des relations du travail, lettre disciplinaire qui fut retirée suite à un engagement (loufoque) de bonne conduite précédé de la démission du CA d’un des signataires (ce qui était l’effet recherché) comme membre du comité d’évaluation de la directrice générale. Ce comportement de Mère supérieure qui donne des leçons de respect et de politesse nous parut grotesque, anachronique, archaïque et en porte à faux. C’était comme si, avec maternalisme, elle nous prenait pour des adolescents délinquants alors que nous ne faisions qu’exercer un droit syndical normal à la critique. Mais nous étions dans l’anormal, la suite des choses allait le montrer.
En sept ans, de 1997 à 2004, le collège est passé d’un surplus considérable de 2.4$ millions à une situation déficitaire.  Prime (légale) de départ dans les six chiffres et dont le montant exact n’a pas été rendu public (ce serait 143,000 $) ; 60,000 $ d’obligations contractuelles lors du congédiement d’un adjoint qui a refusé de persécuter le Littéraire ; 80,000 $ pour une émission au Canal savoir que peu de jeunes regardent ; 73,600 $ pour une étude peu utile de marché ; 135,000 $ de déficit pour l’International ; un gros loyer pour un édifice à moitié vide à Varennes ; 48,900 $ de frais d’avocat : ce sont là des dépenses qui mènent à un déficit. Voilà son bilan comme administrateure. Cela ne l'a pas dérangée de dépenser 48,900 $ de fonds publics en frais d’avocat pour qu’on comprenne bien que, comme le dit Philaminte, la despote des Femmes savantes de Molière, la contestation est ici superflue.
Madame l'ex-directrice, le 17 décembre 2004, le Collège a reconnu vos états de services comme directrice générale pendant sept ans. Même s’il vous restait deux ans à faire, vous avez encaissé votre prime et vous êtes partie parce que vous saviez que votre administration a placé le Collège dans une situation financière difficile et parce que le Conseil d’administration ne vous a pas appuyée dans votre volonté de briser encore une fois le syndicat des enseignants en le poursuivant de nouveau, pour la troisième fois, parce qu’après une entente hors cour qui, selon vous, devait le réduire au silence, il avait osé écrire et publier son explication de ce qui s’était passé pendant la saga judiciaire dans l'Huissier du 25 février 2003. Cette explication vous a déplu. Lors de ce Conseil d’administration, (dont le Littéraire et l’Ingénieur ne faisaient plus partie), votre recherche peu démocratique de l’unanimité s’est heurtée au courage et à la détermination de la représentante du personnel de soutien Lise Latraverse qui refusait qu’on parle de nouvelles poursuites contre l’exécutif du syndicat des enseignants. On a tenté de l’intimider et elle en a été traumatisée.
En défendant la liberté d’expression et la liberté syndicale et en ne nous laissant pas intimider par le recours abusif, disproportionné, inopportun et malveillant aux Tribunaux, nous avons vécu une belle expérience de solidarité entre nous et avec la Fédération autonome, son personnel, ses dirigeants, ses instances et ses services juridiques. En particulier, nous avons bien apprécié l’avocat syndical Jacques Lamoureux pour sa compétence et son humour et le Syndicaliste Daniel Lussier pour son appui politique et financier. Parlant d’humour, après son témoignage controversé du 31 octobre 2001 (celui du cette fois-là, vous étiez à jeun et je le jure), la Directrice, en sortant, a pris les mains de notre avocat en lui disant avec un trémolo dans la voix : Je ne suis plus capable de boire un verre de vin sans être traumatisée. A la sortie de la salle d’audiences, Maître Jacques Lamoureux nous a demandé si elle avait suivi le cours Théâtre 601. Sans doute, avons-nous répondu, et son avocat aussi. Il aurait fallu mettre sous les yeux de la directrice souffrante la phrase d’André Malraux qui dit  que dans la vie, il faut essayer de diminuer autant que possible la part de comédie.
Quand elle signa l'entente hors-cour avec le syndicat des enseignants, Sa Majesté savait qu'elle venait de renoncer à son trône. C'était en effet une abdication car elle avait absolument besoin du judiciaire pour neutraliser son ennemi juré.  
Vieux-Longueuil, 
3 décembre 2009- 16 octobre 2017)

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